Kanakie - Nouvelle Calédonie
Quelques documents
Chantal Deltenre
Postface de Marie Salaün
En 2016, Chantal Deltenre se voit confier une mission d’observation ethnographique par l’administration pénitentiaire française au « Camp Est », la prison de Nouméa en Nouvelle-Calédonie. Elle y est demeurée un mois. Étrangère à l’univers carcéral tout autant qu’au monde calédonien, elle en rapporte un récit qui plonge le lecteur de plain-pied dans un centre de détention directement hérité de la colonisation – et peuplé à 90 % de détenus kanak.
Son témoignage interroge alors avec acuité les impasses d’une justice pénale trop facilement conçue au prisme des « différences culturelles ».
Car c’est surtout la prison dans son ensemble, ici ou ailleurs, que questionne cet ouvrage.
Des Kanaks exhibés dans les expositions coloniales
Un article de France Info du 14 mai 2021
Les émeutes qui secouent le territoire du pacifique permettent de mesurer combien la Constitution française verrouille des complexités territoriales, historiques et humaines qui lui sont étrangères. Et nous confronte à la réalité encore inaperçue d’un nouveau monde qui nous oblige à ouvrir le pacte républicain, plaide l’écrivain martiniquais.
Légendes et chansons de gestes canaques (1875)
Louise Michel (édition moderne avec François Bogliolo)
21-28 mai 1871 : « semaine sanglante » pour la Commune. 35 000 hommes, femmes, enfants fusillés (90 000 selon d'autres estimations), 38 000 prisonniers, dont plus de 4 000 déportés en Guyane et en Nouvelle-Calédonie, le plus loin possible de la métropole.
Condamnée à la déportation en décembre 1871, Louise Michel est embarquée pour la Nouvelle-Calédonie le 24 août 1873.
« On ne fait pas six milles lieues pour ne rien voir et n'être utile à rien » écrit-elle à Hugo. Plantes, insectes, houles, cyclones, tout l'intéresse. La rencontre avec Daoumi, les chansons et danses kanaks, auxquelles elle assiste la nuit, « bercée par la voix des brisants », lui ouvrent un univers, une « grande poésie » qu'elle veut vivre et transmettre.
À Nouméa, dans le premier journal civil de la colonie, « Petites Affiches de la Nouvelle-Calédonie », elle publie en 1875 « Légendes et chansons de gestes canaques » : travail de métamorphose. Après l'amnistie du 14 juillet 1881, Louise Michel peut rentrer en France. Elle publie en 1885, à Paris, des légendes très remaniées : « Légendes et chants de gestes canaques ».
La Calédonie marquera fortement les « Mémoires » (1886) ou le roman (« La Misère », 1882). Une pièce de théâtre située chez les kanaks, « Civilisation », montre (c'est-à-dire dénonce) « comment on civilise ».
Cannibale
Didier Daeninckx
Paris 1931, l'Exposition Coloniale. Quelques jours avant l'inauguration officielle, empoisonnés ou victimes d'une nourriture inadaptée, tous les crocodiles du marigot meurent d'un coup.
Une solution est négociée par les organisateurs afin de remédier à la catastrophe. Le cirque Höffner de Francfort-sur-le-Main, qui souhaite renouveler l'intérêt du public allemand, veut bien prêter les siens, mais en échange d'autant de Canaques. Qu'à cela ne tienne !
Les «cannibales» seront expédiés.
Inspiré par ce fait authentique, le récit déroule l'intrigue sur fond du Paris des années trente - ses mentalités, l'univers étrange de l'Exposition - tout en mettant en perspective les révoltes qui devaient avoir lieu un demi-siècle plus tard en Nouvelle-Calédonie.
La force des racines Kanak en Nouvelle Calédonie
Christian Blanc
Christian Blanc a été un acteur majeur des événements qui se sont déroulés en Nouvelle-Calédonie, entre 1984 et les accords de Matignon de 1988. Il livre ici un document exceptionnel sur cet épisode mouvementé.
« Au moment où va commencer ce récit, les Calédoniens sont en état de choc. Un soulèvement insurrectionnel des populations kanak, indépendantistes, vient d’éclater… » On le suivra de bout en bout, avec de nombreux témoignages inédits qui nous plongent au cœur des négociations entre les principaux protagonistes, métropolitains (Pisani, Rocard, Mitterrand) et calédoniens (Lafleur et les chefs kanak Tjibaou et Yeiwéné).
L’auteur prend soin de présenter le pays, décrivant au passage l’univers des Kanak et celui des Caldoches. Le récit est captivant. Il raconte la rencontre difficile entre des cultures et des intérêts différents, et restitue avec talent la chair de relations humaines intenses, rugueuses, souvent dramatiques. On y perçoit l’estime, partagée, pour des interlocuteurs dont certains ont su s’élever à la hauteur d’une situation dont les enjeux dépassaient leur personne.
Tjibaou déclara un jour : « Il peut y avoir des différences entre les hommes, c’est bien ainsi. Quand on se coupe le doigt, la couleur du sang est toujours rouge, quelle que soit la couleur de la peau. C’est ce qui donne à l’humanité l’unité et la fraternité des hommes sur Terre… » Construire l’avenir devenait possible.
À la fois un livre d’histoire et la chronique passionnante d’une aventure personnelle, qui se lit comme un roman. Un texte clé pour comprendre l’actualité troublée, car la situation en Nouvelle-Calédonie gronde à nouveau.