Littérature homosexuelle
Des livres d'hommes et de femmes qui écrivent sur l'homosexualité ou leur homosexualité.
Le 17 mai a été choisi comme date internationale de lutte contre l’homophobie, car c’est le 17 mai 1990 que l’homosexualité a été retirée de la liste des maladies mentales de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Quelques dates en France :
Gouines
Marie Kirschen, Maëlle Le Corre et Collectif
Un ouvrage collectif pour penser les identités lesbiennes contemporaines et les rendre visibles.
Qu’est-ce qu’être gouine ? Bien plus qu’une orientation sexuelle, l’homosexualité féminine se conjugue au pluriel : ce sont des identités, riches et diverses. Invisibilisées, les lesbiennes ne sont ni vues, ni lues, ni écoutées dans l’espace public et politique. Surtout, elles connaissent la double peine, croisement de l’homophobie et du sexisme : la lesbophobie, qui s’immisce dans toutes les sphères et les communautés de notre société, même dans les plus inclusives. Pour lutter contre ces discriminations et ces violences, il est donc urgent de donner à lire des vécus et des réflexions lesbiennes contemporaines. À travers un collectif composé d’autrices, d’artistes et d’activistes, cet ouvrage entend mettre en lumière à destination du plus grand nombre la richesse des identités lesbiennes d’aujourd’hui.
Tous les silences ne font pas le même bruit
Baptiste Beaulieu
Tu es un garçon de 8 ans. Un dimanche soir, en famille, tu regardes un film qui se moque d'un couple d'hommes. Qu'y a-t-il de si drôle ? Tu deviens un adolescent que l'on insulte : " Sale pédé ! " Tu contemples l'eau noire du canal du Midi, prêt à abandonner. Sur tes épaules, un sac à dos rempli de pierres et ton secret.
Te voilà jeune homme, tenant la main de ton amoureux au risque d'être tabassé, puis père à ton tour. Un médecin révolté, un écrivain qui ne peut plus se taire.
C'est l'histoire d'un homosexuel, aujourd'hui, en France. Son récit nous fait entrer dans sa peau et adopter son regard. Il raconte les préjugés, le harcèlement, la mise à l'écart et les silences qu'il doit affronter. Il y a l'homophobie qui nous révolte et celle que l'on ne soupçonne pas, logée en chacun de nous.
Un grand texte, bouleversant et universel.
Un roman graphique d'Elodie Font & Carole Maurel (Illustratrice)
Un roman graphique subtil pour arpenter le long chemin qui mène à soi...
Visiblement, la Terre entière le savait avant elle : Élo est homo. Dans COMING IN, Élodie Font raconte les longues années - de l'adolescence à la trentaine - qui lui ont été nécessaires avant de réussir à oser, enfin, être elle-même.
Un récit drôle et sensible, mêlant pensées d'hier et réflexions d'aujourd'hui, mis en lumière par le trait puissant et poétique de Carole Maurel.
Livre de Paula Dumont
La plupart des gens ignorent que de nombreux ouvrages mettent en scène des lesbiennes. Afin de pallier cette carence, Entre femmes recense des romans, des oeuvres dramatiques, des recueils de poèmes, des bandes dessinées, des témoignages et des biographies qui mettent au premier plan l'amour d'une femme pour une autre. On trouvera ici les notices de plus de trois cents ouvrages résumés et commentés, publiés de 1900 à 2014.
Livre de Philippe Besson
C’est une histoire de jeunesse qui ne cesse de hanter l’oeuvre de Philippe Besson : son premier amour avec Thomas, un camarade de lycée. Pendant quelques mois, les deux adolescents vivent à l’abri des regards une passion contrariée par le sentiment de honte de Thomas et sa certitude que Philippe quittera leur petite ville de province pour un avenir brillant, tandis que lui restera sur place et reprendra l’affaire familiale.
C’est cette histoire trop tôt avortée, reprise sous différentes formes dans bien des romans de Philippe Besson, qui est mise en scène dans Arrête avec tes mensonges. L’auteur y retrouve la trace de Thomas et reconstitue sa vie brisée par le silence et la pression sociale. D’ores et déjà un des romans les plus remarqués de 2017, Arrête avec tes mensonges est un hommage bouleversant à cet amour sacrifié et un témoignage indispensable sur l’homophobie la plus ordinaire.
Livre d'Armistead Maupin
Cela fait près de quarante ans qu’Armistead Maupin poursuit la rédaction de ses Chroniques de San Francisco, qui comptent maintenant neuf tomes. Très rapidement devenues un classique de la littérature gay, ces chroniques s’imposent grâce à la façon nouvelle dont Maupin décrit la vie des homosexuels de San Francisco. Sur un mode qui évoque à la fois le feuilleton et la sitcom – les chroniques commencèrent dans le journal San Francisco Chronicle et furent ensuite adaptées à la télévision -, Armistead Maupin suit une foule de personnages hauts en couleurs, hommes et femmes en quête de liberté qui, s’ils luttent avec des relations amoureuses compliquées et contre l’homophobie du quotidien, affirment cependant haut et fort et sans aucun dolorisme leurs différences et leurs joies.
Les premiers volumes des chroniques évoquent ainsi les années d’exaltation qui ont suivi les émeutes de Stonewall et ont vu l’acquisition de droits essentiels. Plus tard, Armistead Maupin fut un des premiers romanciers à évoquer dans ses textes la naissance de l’épidémie du sida. A partir du milieu des années 1980, le ton se fait ainsi plus sombre, à la mesure de la tragédie qui frappe la communauté gay. Mais la série d’Armistead Maupin continue malgré tout, jusqu’à aujourd’hui, à offrir des role-models positifs et optimistes qui font de lui une des figures les plus populaires de la littérature gay américaine.
Livre de James Baldwin
A son arrivée à Paris où sa fiancée Hella doit le rejoindre, le jeune Américain David se voit ouvrir les portes d’un monde nouveau par Jacques, habitué des bars interlopes de la capitale où se forment les couples à la faveur de l’obscurité. Il y rencontre Giovanni, barman, et l’attirance immédiate qu’il ressent lui rappelle une première expérience homosexuelle, faite au sortir de l’adolescence…
La chambre de Giovanni met en scène la crise de conscience de David, déchiré entre sa fiancée et son amant, entre son désir réel et sa crainte de ne pas se conformer aux codes de la société. James Baldwin signe là un roman radicalement original pour son époque et analyse avec subtilité la profonde détresse psychologique de son héros, un homme qui ne peut ni aimer ni s’aimer, victime de son incapacité à s’affirmer.
Livre de Jean Genet
Peu d’écrivains ont fait autant pour la reconnaissance d’une véritable culture homosexuelle et queer que Jean Genet. De son premier roman, Notre-Dame-des-fleurs, à la pièce posthume Splendid’s en passant par son seul film, Un chant d’amour, et le poème de prison Le condamné à mort, l’œuvre de Genet ne cesse de célébrer un homoérotisme placé sous le signe des voyous et des garçons des rues.
Parmi ces œuvres, Querelle de Brest, adapté au cinéma en 1982 par Rainer W. Fassbinder, brille d’un éclat particulier. Son héros, Georges Querelle, matelot viril et magnétique qui sème le trouble y compris chez les hommes hétérosexuels, cristallise les tensions qui structurent le regard de Genet sur l’homosexualité. A la fois amant passionné et assassin, issu des bas fonds interlopes mais visant une expérience de l’extase quasi-métaphysique, Querelle incarne cette dialectique du danger et de la béatitude chère à Genet.
Livre de Marguerite Radclyffe Hall
«On la jugeait singulière, ce qui, dans ce milieu, équivalait à une réprobation. Troublée, malheureuse, comme un tout petit enfant, cette large créature musclée se sentait seule, elle n'avait pas encore appris cette dure leçon : elle n'avait pas encore appris que la place la plus solitaire en ce monde est réservée aux sans-patrie du sexe.»
Le puits de solitude fit scandale lors de sa parution à Londres en 1928, où il fut interdit et les exemplaires imprimés jetés au feu. Marguerite Radclyffe Hall y dépeint l'amour de deux femmes, contrarié par une société hostile, et prend la défense de cette minorité incomprise et méprisée. Véritable plaidoyer en faveur de l'homosexualité, Le puits de solitude est aujourd'hui une référence littéraire reconnue par tous.
En dépit du soutien de Virginia Woolf, Vita Sackville-West et E.M. Forster, Le Puits de solitude fut interdit au Royaume-Uni suite à une violente campagne de dénigrement. Cela ne l’empêche pas de se vendre à un million d’exemplaires aux Etats-Unis entre 1916 et 1943, date de la mort de l’auteure.
Livre d'André Gide
Corydon, dont l'édition originale date de 1911, se présente d'abord comme un essai de clarification «franc sans paraître cynique et naturel avec simplicité» sur le sujet de l'uranisme.
S'appuyant sur Montaigne et Pascal, prenant comme prétexte le livre de Léon Blum, Du mariage, Gide souligne le rôle civilisateur de la pédérastie : «La décadence d'Athènes commença lorsque les Grecs cessèrent de fréquenter les gymnases.» Néanmoins, il se défend de prononcer son apologie : se laisse tenter qui le veut bien.
Aussi, dans ces pages qui ne visent pas à l'audace mais à l'honnête examen d'un état de fait qui dure depuis la plus haute antiquité, André Gide aura-t-il combattu pour que l'homosexualité ne fasse pas de l'homme un «contrebandier» de la cité, réprouvé aux yeux du monde comme un rebut de la morale. Et par-dessus tout, transperce une joie de vivre et d'assumer son individualité telle qu'elle est. À l'image de ces quatre dialogues avec Corydon, le médecin des âmes, Gide aura enfin démontré la prééminence des rapports sans équivoque entre les êtres.
Livre d'Oscar Wilde
Oscar Wilde écrivit De profundis de janvier à mars 1897, au cours de ses derniers mois d'incarcération à Reading. C'est le seul ouvrage qu'il rédigea en prison. Et sans doute aussi son chef-d'½uvre et une des plus belles lettres d'amour qui soient, où résonne toute la plainte de l'amour perdu. « Le sanglot d'un blessé qui se débat... », disait Gide. Adressée à celui qui fut à l'origine de son incarcération et de sa chute, Lord Alfred Douglas, cette lettre, oscillant sans cesse entre l'amour fou et la haine, le désespoir et l'exaltation, la laideur du quotidien et la sublimation, marque une rupture définitive dans la pensée de Wilde. Le dandy hédoniste laisse en effet tomber son masque, et c'est sans filet et sans artifices qu'il aborde le désir, les désillusions et la souffrance. Le manuscrit original de Wilde subit des fortunes diverses. Oscar Wilde le remit à son ami Robert Ross en mai 1897 pour qu'il l'adresse ensuite à son véritable destinataire, Lord Alfred Douglas. Mais Ross n'envoya à celui-ci qu'une copie incomplète et déposa l'original en 1909 au British Museum, d'où il ne put être retiré que cinquante ans plus tard. C'est à partir de ce texte, le seul authentique et intégral, que la présente traduction de De profundis a été établie.
Livre de Virginie Despentes
Valentine disparue ... Qui la cherche vraiment ?
Entre satire sociale, polar contemporain et romance lesbienne, le nouveau roman de Virginie Despentes est un road-book qui promène le lecteur entre Paris et Barcelone, sur les traces de tous ceux qui ont connu Valentine, l'adolescente égarée ... Les différents personnages se croisent sans forcément se rencontrer, et finissent par composer, sur un ton tendre et puissant, le portrait d'une époque.
Livre de Jean Genet
«N'est pas Narcisse qui veut. Combien se penchent sur l'eau qui n'y voient qu'une vague apparence d'homme. Genet se voit partout ; les surfaces les plus mates lui renvoient son image ; même chez les autres, il s'aperçoit et met au jour du même coup leur plus profond secret. Le thème inquiétant du double, image, sosie, frère ennemi, se retrouve en toutes ses œuvres. Chacune d'elles a cette étrange propriété d'être elle-même et le reflet d'elle-même. Genet fait apparaître une foule grouillante et touffue qui nous intrigue, nous transporte, et se change en Genet sous le regard de Genet.
Dans le Journal du voleur, le mythe du double a pris sa forme la plus rassurante, la plus commune, la plus naturelle : Genet y parle de Genet sans intermédiaire ; [...]
Son autobiographie n'est pas une autobiographie, elle n'en a que l'apparence : c'est une cosmogonie sacrée. Ses histoires ne sont pas des histoires : elles vous passionnent et vous fascinnent mais vous croyiez qu'il vous racontait des faits et vous vous apercevez soudain qu'il vous décrit des rites ; s'il parle des mendiants pouilleux du "Barrio Chino" c'est pour agiter somptueusement des questions de préséance et d'étiquette : il est le Saint-Simon de cette Cour des Miracles. Ses souvenirs ne sont pas des souvenirs : ils sont exacts mais sacrés ; il parle de sa vie comme un évangéliste, en témoin émerveillé... si pourtant vous savez voir, à la jointure, la ligne mince qui sépare le mythe enveloppant du mythe enveloppé, vous découvrirez la vérité, qui est terrible.» Jean-Paul Sartre.
Livre de Julien Green
Ce texte figure dans le tome 5 des oeuvres complètes de l'auteur
Troisième volet de son autobiographie, Julien Green continue le récit de sa jeunesse. Après avoir raconté son enfance dans Partir avant le jour, puis les années de guerre d'un jeune, trop jeune, engagé volontaire (Mille chemins ouverts), voici l'adolescence qui se termine à l'Université de Virginie, où il est venu passer trois ans. C'est pour lui le paradis ; mais il découvre le terrible pouvoir du visage humain, dans cette ville dont la jeunesse est le prince.
Pour aller des salles de cours à sa petite chambre, il lui faut longer la longue colonnade grecque construite par Jefferson et passer devant la porte de celui à qui il a donné toute la force de son premier amour. C'est le décor de cette tragédie de l'adolescence où le caeur ne sait pas comment échapper à la cage du corps.
Le jeune étudiant connaîtra aussi l'Amérique sudiste dont parlait sa nie, rue de Passy, l'Amérique de ses parents qui a refusé la défaite et qui vit dans le souvenir de ses splendeurs. La guerre de Sécession n'a rien aboli : Savannah, Charlottesville, la Virginie, ce sont toujours de vastes demeures aux colonnes blanches, des avenues nie brique rose, les ombrages des sycomores et des magnolias,. et cette mousse espagnole que le vent fait bouger comme des soupirs...
Le drame du silence dans le coeur du jeune Julien rejoindra celui du pays resté intact dans le souvenir, malgré l'invasion du Nord et l'horrible Reconstruction. Ainsi la Terre lointaine, c'est à la fois cet amour inavoué, ce pays perdu qui sera celui de Faulkner, et pour l'écrivain qui en a gardé tous les charmes, avec une franchise inégalée, sa jeunesse inaccessible et toujours vivante.
Livre de Violette Leduc
«Mon cas n'est pas unique : j'ai peur de mourir et je suis navrée d'être au monde. Je n'ai pas travaillé, je n'ai pas étudié. J'ai pleuré, j'ai crié. Les larmes et les cris m'ont pris beaucoup de temps [...]. Le passé ne nourrit pas. Je m'en irai comme je suis arrivée. Intacte, chargée de mes défauts qui m'ont torturée. J'aurais voulu naître statue, je suis une limace sous mon fumier.»
Livre d'Edmund White
Premier volume d'une trilogie autobiographique, qui s'est poursuivie avec La Tendresse sur la peau et La Symphonie des adieux, Un jeune Américain parcourt les années d'adolescence d'Edmund White. Années au cours desquelles il connaît ses premières expériences sexuelles, mais aussi période de la prise de conscience difficile de son homosexualité. Le héros du livre évolue ainsi lentement du déni à l'acceptation. " Edmund White est l'un des prosateurs les plus étonnants de l'Amérique d'aujourd'hui (...), il a accompli une trajectoire remarquable." Susan Sontag.
Livre d'Edmund White
La Symphonie des adieux est l'histoire d'un homme qui a vu la plupart de ses amis quitter avant lui la scène de sa vie. Le jour où il célèbre le sixième mois anniversaire de la mort de son amant, il effectue le voyage du souvenir qui le ramène vers ses difficultés d'autrefois à devenir écrivain et la découverte du sens de son homosexualité. Sa narration pleine d'esprit, menée sur le ton de la conversation, nous transporte des années soixante jusqu'à nos jours, des scènes érotiques les plus crues dans les back-rooms des clubs new-yorkais jusqu'à des épisode d'une franche hilarité dans certains salons parisiens, ou encore des moments intenses de vérité familiale dans le Midwest américain. L'incroyable variété des amis et relations qui rencontrent ou accompagnent le narrateur constitue peu à peu le ciment du récit et lui insuffle une force inouïe, emportée par les sentiments vrais que sont l'amitié, l'amour et la perte de l'être aimé.
Livre d'Edmund White
Les personnages d'Edmund White baignent dans la tendresse, sans aucune cruauté, froideur ou haine ; ceci en dépit de la franchise avec laquelle est décrit ce monde dur qu'était le milieu homosexuel américain du début des années soixante et l'anonymat apparent d'une partie des relations sexuelles du héros. Edmund White nous entraîne à la suite de son héros, celui de Un jeune Américain, maintenant au seuil de l'âge adulte.
Livre de Daniel Guérin
Guérin fait le récit tendre et romanesque de sa découverte d’une sexualité sans concession, de ses aventures multiples, dans la France du début du siècle. C’est dans cette explosion affective de sa vie de jeune adulte que Guérin, au gré de ses amants et amantes, fait la rencontre du prolétariat.
Au fil des pages, son histoire personnelle et passionnelle déploie les événements de la grande histoire que la vie passionnelle de l’auteur. Du Paris ouvrier à la Palestine et la Syrie sous mandat, en passant par l’Indochine, Guérin fait revivre un temps où les espérances de la révolution d’Octobre sont au premier plan de la scène mondiale et où l’Empire colonial débute son inexorable effondrement.
Daniel Guérin est une figure atypique, iconoclaste. Il a été de tous les combats, et surtout à la pointe de tous les combats – si bien que les thématiques portées par cette autobiographie de jeunesse sonnent aujourd’hui de manière très actuelle.
Livre d'Edouard Louis
"Je suis parti en courant, tout à coup. Juste le temps d'entendre ma mère dire Qu'est-ce qui fait le débile là ? Je ne voulais pas rester à leur côté, je refusais de partager ce moment avec eux. J'étais déjà loin, je n'appartenais plus à leur monde désormais, la lettre le disait. Je suis allé dans les champs et j'ai marché une bonne partie de la nuit, la fraîcheur du Nord, les chemins de terre, l'odeur de colza, très forte à ce moment de l'année. Toute la nuit fut consacrée à l'élaboration de ma nouvelle vie loin d'ici."
En vérité, l'insurrection contre mes parents, contre la pauvreté, contre ma classe sociale, son racisme, sa violence, ses habitudes, n'a été que seconde. Car avant de m'insurger contre le monde de mon enfance, c'est le monde de mon enfance qui s'est insurgé contre moi. Très vite j'ai été pour ma famille et les autres une source de honte, et même de dégoût. Je n'ai pas eu d'autre choix que de prendre la fuite. Ce livre est une tentative pour comprendre.
Livre de Dominique Fernandez
Porporino, le narrateur, élève à l'école des castrats napolitains sous le règne du roi Ferdinand, dans les années 1770, est un personnage inventé mais la plupart des héros qui traversent ses mémoires ont réellement existé : le prince de Sansevero, esprit universel aux frontières du génie et de la démence, Antonio Perocades, franc-maçon rationaliste, la belle Sarah Goudhar et lady Hamilton, aventurières comme seuls en ont produit les anciens régimes, le jeune Mozart, le vieux Casanova et l'illustre Farinelli, plus célèbre en son temps que La Callas au nôtre. On découvrira du même coup, prodigieusement ressuscitée de l'oubli, ce que fut la Naples de ce temps-là, vaste cité aux édifices somptueux, capitale de l'architecture et des arts, rendez-vous de l'Europe éclairée au même titre que Paris, métropole de l'opéra, et Castrapolis unique au monde. Car cette institution des castrats, on le comprendra peu à peu, en suivant les aventures du mémorialiste et de son camarade Feliciano, beauté ravageuse, n'était pas le fruit des seuls caprices d'une aristocratie décadente. Il faut y retrouver, sublimées dans un art du chant malheureusement disparu, certaines des aspirations fondamentales de l'humanité. L'esprit des castrats était un esprit de liberté absolue, un défi à tout ce qui limite, une façon travestie de renouveler les mythes orphiques de la création en échappant à l'obligation d'être un homme. Dominique Fernandez nous donne ici le grand roman qu'on attendait de lui, à la fois éblouissante résurrection d'un passé et méditation sur l'époque contemporaine. Un livre foisonnant de personnages et d'idées, quotidien et singulier à chaque page, mouvementé, divers, lyrique, audacieux, un peu fou, merveilleux palais baroque dont les portes ornées semblent soudain s'ouvrir sur les mystères de l'aujourd'hui.
Livre d'Arthur Dreyfus
Voilà comment Arthur Dreyfus présente son livre : « Un jour, il m’est apparu impossible d’avoir ce qu’on appelle un rapport sexuel sans en faire mention dans un document informatique. Il fallait raconter. À l’intention de ce journal j’ai multiplié les expériences, diversifié mes pratiques, renoncé à certaines rencontres, quand je m’en suis imposé d’autres. Plusieurs fois, j’ai interrompu l’acte pour prendre des notes. Les déceptions ont fini par devenir plus attrayantes que l’extase : elles renfermaient une dramaturgie. Le dernier chapitre de cette aventure voisinerait avec l’obscurité, avec la mort (je ne le savais pas encore). »
C’est le journal minutieux d’une addiction folle, rythmée par l’usage de Grindr. On y trouve des recensions répétées de l’acte sexuel, des poèmes, des aphorismes, mais aussi des aveux, des récits compulsifs de rencontres, des portraits de personnes connues ou inconnues, l’évocation des rapports familiaux, le souvenir d’une extraordinaire grand-mère. C’est surtout l’histoire d’une odyssée contemporaine, et d’une rédemption.
« Ce livre, je le vois comme un labyrinthe dont je suis sorti, mais dans lequel je pourrais me re-perdre, écrit aussi l’auteur. Je le vois comme un piège, mais aussi comme un bouclier. Comme le récit d’une époque, et le reflet d’une autre vie. Je me suis demandé si dans ma fascination pour le sexe, il n’y avait pas d’abord de l’effroi. Et si les autres savaient jouir sans se perdre. Et si se perdre n’était pas notre seule liberté.
Livre de Jeanette Winterson
"Ma mère n'avait pas d'opinions nuancées. II y avait ses amis et ses ennemis. Ses ennemis étaient : le Diable (sous toutes ses formes), les Voisins d'à côté, le sexe (sous toutes ses formes), les limaces. Ses amis étaient : Dieu, notre chienne, tante Madge, les romans de Charlotte Brontë, les granulés antilimaces, et moi, au début." Les oranges ne sont pas les seuls fruits recrée sur le mode de la fable l'enfance de Jeanette, double fictionnel de l'auteur. A la maison, les livres sont interdits, le bonheur est suspect. Seul Dieu bénéficie d'un traitement de faveur. Ce premier roman nourri par les légendes arthuriennes ou la Bible célèbre la puissance de l'imaginaire. Tout semble vrai dans ce récit personnel mais tout est inventé, réécrit, passé au tamis de la poésie et de l'humour. Publié en 1985 en Angleterre, Les oranges ne sont pas les seuls fruits a connu un immense succès, devenant rapidement un classique de la littérature contemporaine et un symbole du mouvement féministe.
Livre d'Alice Coffin
« Enfant, je m’imaginais en garçon. J’ai depuis réalisé un rêve bien plus grand : je suis lesbienne. Faute de modèles auxquels m’identifier, il m’a fallu beaucoup de temps pour le comprendre. Puis j’ai découvert une histoire, une culture que j’ai embrassées et dans lesquelles j’ai trouvé la force de bouleverser mon quotidien, et le monde. »
Journaliste dans un quotidien pendant plusieurs années, la parole d’Alice Coffin, féministe, lesbienne, militante n’a jamais pu se faire entendre, comme le veut la sacrosainte neutralité de la profession. Pourtant, nous dit-elle, celle-ci n’existe pas.
Dans cet essai très personnel, Alice Coffin raconte et tente de comprendre pourquoi, soixante-dix ans après la publication du Deuxième sexe, et malgré toutes les révolutions qui l’ont précédé et suivi, le constat énoncé par Simone de Beauvoir, « le neutre, c’est l’homme », est toujours d’actualité. Elle y évoque son activisme au sein du groupe féministe La Barbe, qui vise à « dénoncer le monopole du pouvoir, du prestige et de l’argent par quelques milliers d’hommes blancs. » Elle revient sur l’extension de la PMA pour toutes, sur la libération de la parole des femmes après #Metoo ; interroge aussi la difficulté de « sortir du placard ». Et sans jamais dissocier l’intime du politique, nous permet de mieux comprendre ce qu’être lesbienne aujourd’hui veut dire, en France et dans le monde.
Combattif et joyeux, Le génie lesbien est un livre sans concession, qui ne manquera pas de susciter le débat.
Livre de Patrick Autréaux
Zakaria vient quand il veut, et s’en va à sa guise. C’est l’amant imprévisible, mais qui apporte quelque chose d’unique. Pas tout à fait l’amour et pas seulement le sexe. La rencontre d’un soir est peu à peu devenue une liaison qui se cache mais qui dure. Jusqu’à ce que l’interdit religieux et les fantômes s’en mêlent. Et que la complicité se grippe. Quelle relation inventer alors pour ne pas tout perdre ?
Marqués du triangle rose
Livre de Ken Setterington
Avant les années 1930, l'Allemagne, et en particulier sa capitale, Berlin, était l'un des endroits les plus tolérants envers les homosexuels. Des militants comme Thomas Mann et Albert Einstein ont ouvertement milité pour les droits des gais. Mais tout cela change quand le Parti nazi arrive au pouvoir. La vie des homosexuels devient alors rapidement un enfer : raids, arrestations, emprisonnement et expulsions deviennent monnaie courante. Lorsque les camps de concentration sont construits, les homosexuels sont emprisonnés en même temps que les autres groupes que les nazis veulent supprimer. Le triangle rose, cousu sur les uniformes des camps, devient ainsi le symbole de la persécution des homosexuels, une persécution qui continuera pendant de nombreuses années après la guerre.
Ken Setterington relate ces événements à travers un mélange de recherches historiques, de témoignages et de récits individuels, avec l'espoir que ces histoires de bravoure devant la cruauté et d'amitiés trouvées dans les profondeurs du désespoir sauront à la fois éduquer et inspirer les futures générations.
Livre de Dominique Fernandez
Ce roman est le premier volume du diptyque « L’homme de trop », sous-titré L’arc-en ciel interdit.
Cette somme romanesque peut se lire comme le pendant du célèbre roman L’étoile rose (Grasset, 1978, réédité en 2012 en CR) puisqu’elle interroge la question gay aujourd'hui, après l'adoption du mariage pour tous.
Lucas Fabert est un photographe de 64 ans. Dans sa jeunesse, il se sentait un paria ; aujourd'hui, il constate, avec des sentiments mêlés, l'insouciance des jeunes homos complètement libérés, complètement intégrés. S'il se réjouit du progrès des mœurs qui leur a apporté le bonheur, il se demande s'ils n'ont pas perdu la force de contestation qui était autrefois la contrepartie glorieuse de leur angoissante marginalité : en un mot, s'ils ne se sont pas embourgeoisés. Jadis "homme de trop" parce qu'il faisait partie de la minorité exclue, il reste "homme de trop" par son refus d'abolir ce qui faisait sa différence, de se banaliser, de se fondre dans le conformisme ambiant.
Dans ce premier tome, Lucas se confie à ses jeunes amis oublieux du passé et ne comprenant pas ses réticences à l’idée que le droit à la différence se soit transmué en devoir de ressemblance. Il leur raconte ce que furent son adolescence, son éducation sentimentale et les épisodes marquants de sa vie jusqu'à la libération des mœurs des années 70. Dans le second volume, sous-titré "La liberté trahie" (à paraître en mars 2022), il évoquera les péripéties de la campagne pour le mariage pour tous et s'interrogera sur les conséquences de la victoire remportée.
Une comédie humaine qui nous fait traverser un demi-siècle d’histoire de France à la boussole de l’homosexualité, une histoire des mœurs romancée qui déborde de personnages et regorge d’événements.
Livre de Philippe Mezescaze
Les jours flottent autour de moi. Je ne sais pas comment m’y prendre, je n’ai prise sur rien. J’existe à la place d’un autre et cet autre est celui que j’étais avant. Je ne me retrouve pas, je me souviens seulement que je vais vivre. Pour le moment j’ai soif des garçons, d’idoles mouvantes, je ne pense qu’à ça, ils se substituent à la peur, ils transforment mes désordres, ils les rendent voluptueux, pendant ces minutes avec eux je dévisage la félicité, ils empêchent que je m’effondre. Je les quitte très vite, parfois je les vole, je ne m’attache à aucun.
Après cinq années passées en prison à Nice, le narrateur saute dans un train de nuit pour retrouver Paris. Il a vingt ans, nous sommes en 1977. De Saint-Germain-des-Prés à la rue Sainte-Anne, du Sept au Palace, il accumule les amants et les amitiés improbables. Sa vie est brouillée et précise à la fois, il côtoie des garçons comme lui qui ne lui ressemblent pas tout à fait, des personnes célèbres aussi avec qui il entreprend des relations plus durables, parfois chaotiques. Le secret de son enfermement à Nice, dont il voudrait se décharger, court tout au long du récit et entrave la poursuite de son destin. Sa solitude est une force sensuelle et mélancolique, elle l’aidera finalement à grandir.
Moi, Pierre Seel, déporté homosexuel
Livre de Pierre Seel, en collaboration avec Jean Le Bitoux
C'est une voix devenue blanche qu'on entendra ici. Pierre Seel se souvient : la déportation dans les camps nazis, la torture et l'humiliation, puis l'enrôlement forcé - comme Alsacien - dans l'armée allemande, le front de l'Est, l'évasion et la capture par les Russes.
Mais il se souvient aussi de son retour de guerre : le mur de réprobation dressé devant lui, l'homosexualité inavouable, la décision de mener une existence « comme les autres », le mariage et la vie réglée.
Qu'aura-t-il fallu pour que, un beau jour d'avril 1982, il choisisse de briser cette apparence et pour que son long silence devienne un long combat pour la vérité ?
Dans le récit de cette vie rompue, on lira l'aveu poignant d'un homme qui voudrait, simplement, que justice lui soit enfin rendue.
Livre de Didier Eribon
Après la mort de son père, Didier Eribon retourne à Reims, sa ville natale, et retrouve son milieu d'origine, avec lequel il avait plus ou moins rompu trente ans auparavant. Il décide alors de se plonger dans son passé et de retracer l'histoire de sa famille. Évoquant le monde ouvrier de son enfance, restituant son ascension sociale, il mêle à chaque étape de ce récit intime et bouleversant les éléments d'une réflexion sur les classes, le système scolaire, la fabrication des identités, la sexualité, la politique, le vote, la démocratie...
Réinscrivant ainsi les trajectoires individuelles dans les déterminismes collectifs, Didier Eribon s'interroge sur la multiplicité des formes de la domination et donc de la résistance.
Un grand livre de sociologie et de théorie critique.