Le blog de Pierre Ahnne
Un blog littérairee

Nous publions sur cette page une sélection de textes parus initialement sur le blog de Pierre Ahnne et reproduits ici avec l'aimable autorisation de l'auteur
Extrait de la prérsentation du blog :
... ce blog va fêter son cinquième anniversaire (les problèmes d’intervalles étaient très tendance à l’époque des tabliers à carreaux et des sacs à bretelles). C’est en effet à la rentrée 2011 que naquit La petite revue littéraire d’Ahnne et Pétel, fruit, comme son nom l’indiquait, de notre collaboration, à Gilles Pétel et à moi. Un an plus tard elle devenait Le blog littéraire de Pierre Ahnne tout seul, avant de se transformer au mois de janvier 2014, chez Eklablog, en ce Nouveau blog littéraire de Pierre Ahnne que vous connaissez. Merci de l’avoir soutenu, de l’avoir lu, de le lire. Merci à ceux qui se sont abonnés à sa newsletter, merci à ceux qui vont le faire. Que serait-il sans vous ?
Pierre Ahnne, sur son blog, propose son abécédaire en vingt-six lettres et vingt-six semaines. (publié du 27 Novembre 2018 au 21 mai 2019)
"Les plus anciens lecteurs de ce blog se rappellent peut-être le temps où avait commencé d’y paraître, une lettre de temps à autre, selon l’humeur, L’Alphabet hasardeux de Philippe Arbogast. Le fantôme de Philippe Arbogast, ce double littéraire possible, a disparu à l’horizon. Ce sont donc tout uniment et franchement Mes vingt-six lettres, complétées, harmonisées, munies de discrètes passerelles pour les relier les unes aux autres, qui vont venir s’inscrire au cours de semaines à venir dans la rubrique Fiction. Pendant vingt-six semaines, sauf cas particulier. Et de A à Z. Plus de hasard.
Des lettres, sur un blog littéraire, c’est un peu normal. En mettant les miennes bout à bout, on y verrait peut-être le portrait d’une époque, et aussi les origines d’un certain intérêt pour les mots et pour leur usage.
Car, les alphabets ramenant toujours peu ou prou à l’enfance, les stations du mien ont chacune un rapport plus ou moins direct avec cet âge prétendu tendre. Noël approche, son cortège de rennes, de souvenirs et de santons, le moment m’a paru propice pour commencer. Par la lettre A, comme de juste. Comme alcool. Mais Noël est aussi la fête des excès de table."
A | B | C | D | E | F | G | H | I | J | K | L | M | ||||||||||||
N | O | P | Q | R | S | T | U | V | W | X | Y | Z |
à propos de "La vengeance m’appartient" de Marie Ndiaye

Note de lecture le 30 Janvier 2021 sur son blog
"Soulignons-le d’emblée : Marie Ndiaye fait entendre, en littérature, un ton unique. C’est-à-dire, d’abord, une écriture, un style, osons le mot, uniques : phrases longues, sinueuses, immédiatement reconnaissables ; d’une précision et d’une préciosité, dans le dialogue comme dans le récit, qui se rient du réalisme et sonnent toujours légèrement ironiques. Et leur singularité tient aussi peut-être à ce qu’elles nous donnent toujours l’impression, caractéristique de l’ironie, de sous-entendre quelque chose, tout en s’enchaînant selon la logique, typiquement humoristique, propre au rêve...."
des œuvres que les flux et les reflux de l’actualité ne peuvent pas atteindre

Pour le 3è anniversaire de sa mort, survenue le 4 janvier 2018, Pierre Ahnne republie la note écrite en décembre 2012 à l'occasion de la parution du livre "Le garçon qui voulait dormir"
"Quand les bruits de la rentrée littéraire s’estompent on éprouve l’envie et peut-être le besoin de se tourner vers des œuvres que les flux et les reflux de l’actualité ne peuvent pas atteindre. Manière de se changer les idées, pour ainsi dire. Le garçon qui voulait dormir, d’Aharon Appelfeld, paru en français aux Éditions de l’Olivier en 2011, a été republié il y a quelques mois dans la collection « Points ». Saisissons ce prétexte...."
- L'intégralité de l'article
- Un article paru le 23/06/2011 dans LE MONDE
- La fiche du livre sur le site de l'éditeur
A propos de "La famille du tigre ailé"

Une note de lecture sur son blog, le 5 décembre 2020
"Paula Fürstenberg, dont c’est le premier roman, est née en RDA peu avant la réunification. Son héroïne, Johanna, aussi. Elle a 19 ans et apprend à conduire des trams dans une ville longtemps divisée en deux, mais qui ne l’est plus. Elle voyage d’une ancienne moitié à l’autre comme entre le présent et le passé. Car son père, qui a disparu quelques semaines avant la chute du Mur, c’est-à-dire quelques années après sa naissance, vient de laisser, pour la première fois, un message sur le répondeur de son ancienne épouse. Johanna se lance à la recherche de ce géniteur si longtemps évanoui, pour découvrir qu’il est en train de mourir d’un cancer généralisé, lequel, rapidement, le prive de la parole. ..."
Adieu, Daniel Cordier

Pierre Ahnne republie sur son blog la note écrite en 2016, lors de la sortie de la version "poche Folio" du livre autobiographique de Daniel Cordier "Les feux de Saint-Elme"
"... On plonge dans un autre temps. Un temps où des jeunes gens de quatorze à seize ans, maintenus dans une prudente ignorance par les Bons Pères dominicains qui les éduquent en internat, lisent Duhamel, Gide (en secret), et Maurras — car ce futur combattant de la France libre est camelot du roi ; il envisage même d’acheter un revolver quand le Front populaire gagne les élections en 1936. On porte un uniforme, on se confesse, on va se promener en rangs du côté de la dune du Pilat. Pendant les vacances, on rejoint sa famille dans des villas de Biarritz. Le beau-père de Daniel est inquiet pour son usine, à cause des Rouges ; et il s’indigne que ce pensionnat de Saint-Elme, si chrétien, accepte parmi ses élèves un David Cohen...."
Résumé du livre :
Adolescent dans un internat religieux d’Arcachon, Daniel Cordier y découvre son attirance pour les garçons et pour David, en particulier. Cette passion, interrompue par son renvoi du collège, ne cessera de le hanter tout au long de sa vie.
On connaît Daniel Cordier pour sa vie exceptionnelle : secrétaire de Jean Moulin, Compagnon de la Libération, grand collectionneur d’art, historien de la Résistance.
Il nous livre avec Les feux de Saint-Elme un récit autobiographique à la fois émouvant et inattendu.
Entretien avec Sarah Manigne

Sur le blog de Pierre Ahnne, à propos du livre "Quitter Madrid" de Sarah Manigne
« Elle travaille dans une école de cinéma, mais ses romans (L’Atelier, 2018, Quitter Madrid, 2020, tous deux au Mercure de France) parlent de peinture et de peintres, réels ou imaginaires. Les surfaces, les couleurs, les plis des étoffes n’y voilent qu’à peine la violence du monde, et la pureté de la phrase y contraste avec le caractère charnel et tourmenté de la fiction.
Tout cela, qui m’a frappé à la lecture de son dernier livre, me donnait grande envie de poser à Sarah Manigne quelques questions pour ce blog. Elle a aimablement accepté d’y répondre…. »
Pierre Ahnne nous parle de "Fille", le dernier livre de Camille Laurens

Article publié en août 2020 sur son blog
La première réussite, c’est le titre. Non seulement par sa simplicité efficace et sa limpidité trompeuse, mais parce qu’il annonce tout d’un livre dont il ne dévoile pourtant rien.
Oui, bien sûr, c’est l’histoire d’une fille, puis d’une femme, et de la « perte de chance » initiale à surmonter que cela représente dans une société faite par et pour les hommes. Cette fille s’appelle Laurence, comme Camille, mais n’a pas le même nom de famille. Elle est née à Rouen, contrairement à l’auteure, qui y a cependant enseigné. Son père, médecin et protestant, aurait rêvé d’avoir un fils. Pour lui, « C’est une fille » sonnera, à trois reprises, comme « Ce n’est pas un garçon »....
Quatre notes de lecture récentes de pierre Ahnne
Sur le blog de Pierre Ahnne (octobre 2020)
►La Ville aux acacias
Mihail Sebastian, traduit du roumain par Florica Courriol (Mercure de France)
Lire sa note de lecture ICI
►La Mon père, ma mère, mes tremblements de terre
Julien Dufresne-Lamy (Belfond)
Lire sa note de lecture ICI
►Porc braisé
An Yu, traduit de l’anglais par Carine Chichereau (Delcourt)
Lire sa note de lecture ICI
►Le Petit Polémiste
Ilan Duran Cohen (Actes Sud)
Lire sa note de lecture ICI
à propos du livre "Histoire du fils", de Marie-Hélène Lafon

Une note de lecture sur le blog de Pierre Ahnne, le 6 octobre 2020
"On m’en a dit si souvent tant de bien… Beaucoup de mes amis ne tarissent pas d’éloges à propos de Marie-Hélène Lafon. Je leur réponds que je n’ai pas été convaincu par Les Pays (Buchet-Chastel, 2012, voir ici) : trop d’adjectifs à mon goût dans ce roman, qui racontait le même genre d’histoires que Michon ou que Bergounioux, la profondeur en moins. Quand je dis ça, mes amis s’attristent. Et moi, j’ai fini par penser que j’avais sans doute lu le moins bon livre, dans les pires dispositions… Bref, lorsque Histoire du fils a été annoncé par l’éditeur habituel de Marie-Hélène Lafon, j’ai vu l’occasion ..."
Présentation du livre "Qui sème le vent", de Marieke Lucas Rijneveld

Sur le blog de Pierre Ahnne
"Ce n’est pas un roman rural, et, bien que ça se passe dans une ferme, la nature en tant que telle est étrangement absente. Ce n’est pas non plus vraiment un roman d’éducation, même si l’héroïne-narratrice se trouve au tournant de l’enfance à l’adolescence, et qu’à la fin elle est « presque formée ». Qu’est-ce que c’est ? Quelque chose comme un brutal et exubérant chant funèbre...."
Pierre Ahnne à propos du livre "Des kilomètres à la ronde"

Une recension de Pierre Ahnne à propos du livre "Des kilomètres à la ronde", de Vinca Van Eecke
"C’est l’histoire d’une fascination. La narratrice anonyme a 14 ans. Comme tous les étés, elle passe ses vacances dans la maison que ses parents possèdent dans un village sis quelque part du côté du Massif central. Le mot important, c’est central : on est dans la neutralité d’une campagne française essentielle. C’est là qu’elle les rencontre. Ils y sont nés. Ils s’appellent Phil, Buddy, Mallow, Jimmy, José…, et leurs prénoms ou leurs surnoms renvoient à leur classe — le prolétariat rural blanc. « C’est fou ce qu’ils [sont] beaux »...
Un an de mieux

Pierre Ahnne présente la rentrée littéraire "automne 2020"
"Voici l’année nouvelle. L’année littéraire, bien sûr, qui commence cette semaine. La précédente a été mouvementée, tout le monde s’en sera aperçu, traversée non seulement par le malin virus mais par toutes sortes d’affaires, qui touchaient le monde littéraire ou des arts en général. Vous remarquerez que je n’en ai rien dit. Ma discrétion proverbiale, sans doute, ou, plus probablement, le fait que ce blog, comme son nom l’indique, s’occupe de littérature — pas de la vie des personnes civiles.
Je continuerai, pour la dixième année, à lire, dans cet esprit, ce qui se publie, et à en parler à celles et à ceux qui voudront bien continuer eux-mêmes de me lire..."
La Moleskine du diable

Pierre Ahnne, sur son blog, re-publie un article ancien.
"Je ne serai jamais un véritable écrivain car je n’ai pas de petit carnet. Un véritable écrivain a un petit carnet à couverture de moleskine dans lequel il inscrit de petites notations, lumières, visages, dialogues entendus dans le métro. Il ne se sépare jamais de ce petit carnet. Grâce aux notations qu’il y note..."
à propos du livre "L'ombre de ma mère" de Claude Londre

Une note de lecture de Pierre Ahnne - 28 mars 2020
Dans un récit paru en 1814, Adalbert von Chamisso racontait l’histoire de Peter Schlemihl, l’homme qui avait perdu son ombre. Le héros de l’écrivain romantique allemand vivait cette perte comme une malédiction. L’héroïne de Claudine Londre, elle, aimerait bien se débarrasser de l’ombre qui l’accompagne partout. Il faut dire que ce n’est pas la sienne. C’est celle de sa mère. De ce point de départ, l’auteure tire un premier roman qui s’inscrit dans un genre assez spécial : le gothique plaisant.
« Que font les ombres quand il pleut ? »
L’histoire progresse au gré des hasards qu’invente à mesure l’imagination de celle qui écrit et, peut-être, de celle qui parle : « Vous et moi, nous tous ensemble, allons (…) explorer cette étrange histoire dont j’aimerais moi-même connaître la fin, car j’avance présentement avec une lampe torche et très peu de visibilité »…
A propos de "Rome en noir"

Note parue sur le blog de Pierre Ahnne, le 25 janvier 2020
Ce n’est pas un hasard si tout commence dans les étoiles. Et s’il sera souvent à nouveau question, dans le livre de Philippe Videlier, d’astronomie, voire d’astrologie, ce n’est pas seulement parce que certains de ses héros s’entourent de mages et croient en l’horoscope. La mention, dès la première page, de la « planète minuscule » baptisée, cette année-là, 1932 PB, et de la « comète Brooks » convient bien à un récit où le carambolage de faits, minuscules ou non, invite à une réflexion sur le hasard et le destin. Surtout, elle annonce que, dans ce roman commencé du côté de Sirius, le jeu des points de vue va constituer l’armature de la narration.
Note de lecture de Pierre Ahnne

Pierre Ahnne parle de "PAPA" de Régis Jauffret
Avec les mères, c’est rarement simple, mais avec les pères c’est souvent compliqué. Jauffret, avec le sien, n’a pas eu la tâche facile. C’est difficile, un père sourd. Allez vous étonner, après, que le fils écrive… Et quand, à l’enfermement de la surdité, s’ajoutent la dépression chronique et ses médicaments « qui empêch[ent] de penser », la coupe est pleine : « Alfred, tu n’étais même plus un homme, juste un organisme, avec au fond de la coquille un ego dévasté, piqué sur le cerveau comme un papillon sur un bouchon de liège ». « On ne traite pas un père de la sorte. Mais on a le droit d’injurier un donneur de sperme ».
Pierre Ahnne présente "la Fabrique des salauds" de Chris Kraus

Note de lecture de Pierre Ahnne, parue sur son blog le 14 janvier 2020
"850 pages. Il n’entrait pas dans ma boîte aux lettres. Aussi fut-il, comme il arrive, déposé sur les boîtes par le coursier pressé, et disparut. Il y a des gens bien malfaisants. Et encore, s’ils s’appropriaient les livres pour les lire… Mais mon exemplaire du roman de Chris Kraus risque fort d’avoir été vendu au plus offrant.
Cependant, certains envois doivent, sans doute, en vertu d’une nécessité qui nous échappe, atteindre leur destinataire. Les éditions Belfond ont eu l’amabilité de me faire parvenir une autre version, numérique, celle-là, de l’ouvrage. Je l’ai lu, plus tard que prévu, en marge des répétitions de ma pièce, La Cantatrice et le Gangster (voir ici). Il fallait bien ça pour m’abstraire de mes préoccupations du moment. Mais ça m’en a abstrait. Quand une lecture est aussi efficace, et ce, sur 850 pages, la moindre des choses est de se demander pourquoi...."
à propos du livre "Faux passeports", note de Pierre Ahnne

Un article de Pierre Ahnne paru le 7 décembre 2019 sur son blog.
"Voilà un livre, et, peut-être, de plus d’une manière, d’un autre temps. Et c’est ce qui en fait, pour une part, l’intérêt. En octobre 1917, Charles Plisnier a 23 ans. Son enthousiasme fait de ce jeune juriste belge un avocat dévoué à la cause du communisme, doublé d’un « agitateur » (il le dit lui-même) : militantisme effréné et quelques missions dangereuses, à la grande époque du Komintern. Puis, c’est l’exclusion, pour trotskisme, au congrès d’Anvers, en 1928. Dans une œuvre, semble-t-il, bien de son temps (Mariages, Meurtres, La Beauté des laides…), Faux passeports, prix Goncourt 1937, tranche. Pour étoffer et unifier ce qui ressemblait trop à un recueil de nouvelles, l’auteur, à la demande de son éditeur (Buchet-Chastel-Corréa), y ajoute le chapitre final, Iégor, où il évoque Anvers, le conflit entre staliniens et trotskistes, les procès de Moscou, et cet « héroïsme du déshonneur » qui poussait les accusés à s’inventer des crimes parce que le Parti le voulait...."
- L'intégralité du texte
- Fiche du livre (dernière édition 2019)
- Un article dans ActuaLitte (29/11/2017)
La cantatrice et le gangster

En novembre 2019, le 24 à 17h30 et les 19, 20, 21, 22 et 23 à 21h00 Théâtre de l’Ile Saint-Louis Paul Rey - 39 Quai d’Anjou dans le 4e arrondissement de Paris.
Pièce de théâtre de Pierre Ahnne avec Marion Hérold et Markus Fisher.
Mise en scène de Marie-Pierre Pêcheur
"Apparemment, tous deux sont en voiture. Lui, c’est l’ennemi public numéro un, qui s’est évadé. Il est armé. Il l’a prise en otage et contrainte à rouler vers l’est. Elle, c’est une cantatrice. Un gangster et une cantatrice, ça ressemble tout de suite à quelque chose. Mais, depuis le début, leurs façons de parler et d’agir semblent un peu bizarres. Est-il pour de bon un gangster ? Est-elle vraiment une cantatrice ?..."
Pierre Ahnne
"Dans les romans que j’ai écrits, j’essayais d’avoir une voix : un phrasé, un rythme, une sonorité… L’écriture, pour moi, a toujours eu partie liée avec le corps.
Il était fatal que, venant à écrire pour la scène, je fasse parler une chanteuse. Elle chantera bien une ou deux phrases de temps en temps, a capella, mais cela restera, à chaque fois, une surprise. La faire parler, donc. Et de quoi ? De sa voix, de cette chose étrange que c’est d’avoir une voix. Est-ce qu’on en a une à proprement parler, ou est-ce plutôt quelque chose de l’ordre de l’être ?
Lui, en face d’elle, aura un pistolet, dont il le menacera. Là, c’est clair : un pistolet, on l’a ou on ne l’a pas. À moins que…
D’un côté, quelque chose qu’on a mais qui ne se voit pas car ça fait partie de ce qu’on est, de l’autre, un objet sorti tout droit du roman policier, du cinéma, un objet de fiction. Un objet fictif ?... Et les deux héros, après tout, sont-ils bien sûrs d’être réels ?"
- Réservation : 01 46 33 48 65
- Email : ouverture client messagerie
- Quelques images du spectacle (vidéo)
A PROPOS DE "SCRABBLE" DE MICHAËL FERRIER

Un article de Pierre Ahnne paru le 10 septembre 2019 sur son blog.
Pour fêter une enfance… On songe souvent à ce titre et à ce recueil de Saint-John Perse, en lisant le livre, ponctué de photos, que Michaël Ferrier consacre à ses dix ou douze premières années, passées dans un pays d’Afrique. On y pense pour la langue, poétique et musicale, pour les courts paragraphes, éclats de souvenirs où tous les sens sont convoqués, la « pourpre des flamboyants » ou les « capsules roses et rouges du savonnier » répondant aux sons des voix féminines et aux parfums des onguents et des fards, qui composent « une fête florale, un poème parfumé ». On y pense aussi pour le ton, lequel sait, sans emphase, se faire incantatoire et rythmé : « L’enfance : le temps passait, les années se suivaient, traversées par les cris des oiseaux, gorgées de papayes et de mangues »…
À PROPOS DE "L'ORDINAIRE MÉSAVENTURE D'ARCHIBALD RAPOPORT", DE PIERRE GOLDMAN

Un article de Pierre Ahnne paru le 18 mai 2019 sur son blog.
"Je me souviens très bien de son assassinat. Du sentiment, que nous fûmes nombreux à éprouver, de voir disparaître avec lui, à la veille des années 1980, sous les balles probables de policiers d’extrême droite, d’agents des services secrets ou de truands manipulés, les espoirs et les exaltations qui avaient été ceux de toute une époque.
Plus fictif que la fiction
Difficile de parler de ses livres sans évoquer sa vie… Rappelons donc quelques faits. Né en 1944. Parents juifs polonais, membres de la MOI(1). Étudiant, il adhère aux Jeunesses communistes. Puis, séjour à Cuba, et au Venezuela, où il milite dans un mouvement de guérilla...".
À PROPOS DE "COURT VÊTUE", PREMIER ROMAN DE MARIE GAUTHIER

Note reproduite ici avec l'aimable autorisation de l'auteur. Cette note a été écrite en janvier 2019, donc bien avant l'attribution du prix.
Il faudrait d’abord parler du titre. De cette expression qui, par l’ellipse sur laquelle elle paraît se fonder, par l’antéposition et l’emploi adverbial de l’adjectif, imite l’allure bondissante de celle qu’on imagine, comme dit le fabuliste, « ainsi troussée »… Jolie trouvaille, cette locution primesautière pour un livre qui ne l’est pas, mais refuse de l’être avec autant d’insolence que son titre en suggère.
Le thème en est classique et abondamment exploré. C’est l’été. On est dans un petit bourg avec une rivière. Félix, quatorze ans, a été mis en apprentissage chez le cantonnier : « On ne savait trop quoi faire de ce corps maladroit d’adolescent ». De deux ans plus âgée, la fille du patron, Gil, ne va plus à l’école. Elle fait à manger pour tout le monde, travaille à la supérette et se donne à des hommes. « Jeunes, vieux, hommes mariés, moustachus, barbus, poilus. Ça étourdissait Félix. Ça lui faisait un drôle d’effet d’imaginer tout ce qui entrait dans le corps de Gil »...
I AM, I AM, I AM

Note de Pierre Ahnne parue sur son blog le 20/04/2019. Reproduite avec l'aimable autorisation de l'auteur
De Maggie O’Farrell, j’avais aimé En cas de forte chaleur (Belfond, 2014), où elle laissait libre cours à son talent pour tirer le quotidien vers la folie. Beaucoup moins Assez de bleu dans le ciel (Belfond, 2017)… Mais, au total, quelque chose, chez l’écrivaine irlandaise, devait me donner envie de lui faire encore confiance. J’avais raison.
Une vie doit-elle être intéressante pour mériter d’être contée ? Bien sûr que non. Peu importe donc ce qu’a été jusqu’à ce jour la vie de Maggie O’Farrell. Elle a été malade dans son enfance, s’est révoltée au cours de son adolescence, a voyagé dans sa jeunesse, s’est mariée, a eu des enfants… Rien de spécial, en somme. Et on trouve le temps un peu long quand elle se répand à propos de l’amour maternel, ou raconte en détail un de ses accouchements (mais peut-être est-ce de n’avoir jamais accouché soi-même). ...
NOTE DE PIERRE AHNNE À PROPOS DE "AU SEVILLA BAR" D'ALEX CAPUS

Note de Pierre Ahnne à propos du livre "AU SEVILLA BAR" parue sur son blog le 13 avril 2019. Reproduite ici avec l'aimable autorisation de l'auteur.
En fin de compte, qu’est-ce exactement que l’autofiction ? Malgré les définitions, qui foisonnent, personne au fond ne pourrait dire en une formule simple et convaincante de quoi il s’agit, même si personne n’hésite à reconnaître immédiatement un exemple donné du genre. Dans ce continent flou se détache une région parmi bien d’autres : l’autofiction sans fiction. Qui ne raconte ni la vie d’un parent de l’auteur, ni une rupture amoureuse qu’il a vécue, ni même l’écriture d’un de ses livres. Qui refuse tous les sujets, pour tenir une chronique décousue de la vie de celui qui parle....
PIERRE AHNNE PARLE DE "SHILOH", DE SHELBY FOOTE

Note de lecture de Pierre Ahnne parue sur son blog, le 2 mars 2019. Reproduite avec l'aimable autorisation de l'auteur.
"C’est une chapelle méthodiste en rondins, quelque part dans le Tennessee. Et c’est aussi une bataille, qui opposa, les 6 et 7 avril 1862, les armées confédérées, commandées par Johnston et Beauregard, à celles de l’Union, sous les ordres de Grant. À l’époque, elle atterra par sa violence les opinions publiques des deux camps. Celles-ci, pourtant, étaient loin d’être au bout de leurs peines…
Petit-fils de planteur, né et mort dans le Mississippi, auteur d’un récit de 3 000 pages sur le conflit, Shelby Foote avait publié Shiloh en 1952. Mais c’est aujourd’hui seulement que paraît une traduction française, d’ailleurs remarquable, de ce qui, malgré l’absence d’indication en page de titre, est bien un roman..."
PIERRE AHNNE PARLE DE "WEST" DE CARYS DAVIES

Note de lecture de Pierre Ahnne parue sur son blog, le 19 janvier 2018. Reproduite avec l'aimable autorisation de l'auteur.
On a peine à imaginer titre plus simple et plus efficace — le traducteur, dont il faut par ailleurs louer le travail remarquable, a été bien inspiré de le conserver. West : ce mot en coup de vent semble ouvrir directement sur les horizons qu’il évoque, et que les rêves de nos enfances, au sortir des cinémas de quartier d’antan, ont parés de tous les prestiges.
Songes et mystères
Des rêves, ici, il y en a beaucoup. Cyrus Bellman, dans sa ferme de Pennsylvanie, veille sur sa fille Bess (11 ans) et élève des mules, sans se consoler de la mort de sa femme. Mais voilà qu’un journal local annonce la découverte d’ossements semblant avoir appartenu à des animaux d’une taille prodigieuse. Peut-être vivent-ils encore, au fond des vastes espaces inexplorés qui, dans cette Amérique du début du XIXe siècle, s’étendent au-delà du Mississippi ? ...
PIERRE AHNNE PARLE DE "LÀ OÙ LES CHIENS ABOIENT PAR LA QUEUE" D'E-S BULLE

Notre de leture parue initialement sur le blog de Pierre Ahnne et reproduite avec l'aimable autorisation de l'auteur.
"Là où les chiens aboient par la queue, c’est-à-dire où ? Eh bien… la seule expression française qui me vienne comme équivalent de cette formule traduite du créole, évoquant le fondement des hommes plutôt que celui des canidés, est trop grossière pour les pages de ce blog. Dans le roman d’Estelle-Sarah Bulle, il s’agit d’un bourg guadeloupéen au nom autrement enchanteur : Morne-Galant. Mais « Morne-Galant », dit un des personnages, « n’est nulle part, autant dire une matrice dont je me suis sortie comme le veau s’extirpe de sa mère : pattes en avant ».
« Nom de brousse »
Voilà le point de départ d’un récit qui nous mènera à Pointe-à-Pitre, puis à Paris, ce déplacement dans l’espace accompagnant un cheminement à travers l’histoire de la Guadeloupe contemporaine, des années 1950 à nos jours. Ça débute à l’époque où « le commerce des containers gav[e] les habitants d’une identité nouvelle », et où « le roi béton commenc[e] à s’installer », tandis que reculent les cultures et les modes de vie traditionnels...."
PIERRE AHNNE PARLE DE "BERLIN FINALE" DE HEINZ REIN

Note de lecture parue le 24/11/2018 sur le blog de Pierre Ahnne et reproduite ici avec l'aimable autorisation de l'auteur
D’abord, c’est, bien sûr, un document. Paru en 1947, réédité en 2015 à l’initiative de Fritz Raddatz, ancien directeur de la rubrique littéraire de Die Zeit, inédit en France jusqu’à cette traduction publiée par Belfond dans sa collection [vintage], si souvent célébrée ici. L’auteur : né en 1906, employé de banque, puis journaliste ; interdit de publication en 1935 ; arrêté par la Gestapo, condamné aux travaux forcés. C’est dans le secteur soviétique de Berlin qu’il publie ce qui restera sa grande œuvre, et un des premiers best-sellers de l’après-guerre. Au début des années 1950, Rein passe à l’Ouest. Il meurt en 1991, peu après la chute du mur.
20 jours
Voici donc, écrit immédiatement après les événements, un roman-reportage sur les derniers jours de Berlin. Et peut-être plus que cela. Mais il est vrai qu’on suit, du 14 avril au 2 mai 1945, jour après jour, presque heure par heure, les derniers soubresauts de la capitale du Reich, au fil d’un récit qu’entrecoupent des extraits de discours de Goebbels ou de communiqués de la Wehrmacht....
PIERRE AHNNE PARLE DE "A SON IMAGE" DE JÉRÔMME FERRARI

Note de lecture parue le 15/11/2018 sur le blog de Pierre Ahnne et reproduite ici avec l'aimable autorisation de l'auteur
On le sait depuis ce Sermon sur la chute de Rome (Actes Sud, prix Goncourt 2012), qui l’a fait connaître : Jérôme Ferrari a le goût des rites et des pompes. Ceux, surtout, de l’Église catholique et romaine. Un goût que l’on retrouve dans ce roman-ci, lequel est, à y bien regarder, le récit d’un enterrement. Antonia est encore jeune, elle est photographe, elle est corse. Un soir, à Calvi, elle retrouve, devenu légionnaire, un ancien combattant de la guerre de Yougoslavie, qu’elle a couverte. Ils passent la nuit à parler de l’absurdité du conflit, de la violence, des pièges de l’Histoire. Le matin, elle prend le volant pour rejoindre son village natal et sa famille. Accident ? Suicide ? Le roman laisse le choix : « Les premiers rayons vinrent illuminer le visage d’Antonia. Elle se laissa éblouir un instant et ferma les yeux »....
PIERRE AHNNE PARLE DE "FRANÇOIS, PORTRAIT D'UN ABSENT" DE MICHAËL FERRIER

Note de lecture parue le 10/11/2018 sur le blog de Pierre Ahnne et reproduite ici avec l'aimable autorisation de l'auteur
Bonne saison pour les prix : le lendemain de l'attribution du Goncourt à Nicolas Mathieu pour Leurs enfants après eux, le prix Décembre est venu couronner ce François, portrait d’un absent, qui n’est pourtant pas un roman.
On y voit Michaël Ferrier apprendre, fin 2013, la mort de son ami François Christophe, documentariste et réalisateur de radio. Lui et sa fille de onze ans, Bahia, ont été emportés par une vague, sur une plage des Canaries. L’auteur de Sympathie pour le fantôme (Gallimard, 2010) entreprend, sous le titre d’un des documentaires du défunt, Thierry, portrait d’un absent, d’écrire pour lui ce qu’on appelle un tombeau. C’est-à-dire, en fin de compte, le contraire d’un tombeau, s’il est vrai que « dans sa fragilité même, le papier est supérieur au marbre », et que l’écriture doit ici « extraire » des ténèbres et « sort[ir] du gouffre du temps » les disparus....
PIERRE AHNNE PARLE DE "LEURS ENFANTS APRÈS EUX" DE NICOLAS MATHIEU

Note de lecture parue le 01/09/2018 sur le blog de Pierre Ahnne et reproduite ici avec l'aimable autorisation de l'auteur
Ce devrait être un des livres dont on parle en cette rentrée. Ou alors, c’est à désespérer. Tous les ans, parmi des ouvrages souvent séduisants, parfois moins, il y en a un ou deux qui tranchent par une sorte d’intensité particulière. C’était le cas, par exemple, en septembre 2017, de Fief, le roman de David Lopez, avec lequel celui de Nicolas Mathieu présente d’indéniables points communs. Au-delà de grandes différences : de propos, d’écriture, de volume…
Après la fin de l’Histoire
Car le premier miracle ici est qu’on lit sans efforts ni ennui un livre de 400 pages qui raconte, sans événements considérables, la vie d’un groupe d’adolescents, entre 1992 et 1998, dans une de ces vallées jadis ouvrières qui sinuent quelque part entre Thionville et le Luxembourg. Ces vallées, je les ai connues, Nicolas Mathieu a seulement changé les noms des lieux (Heillange au lieu d’Hayange, Lameck pour Fameck…). Mais je les ai connues alors que les aciéries lançaient encore leurs ultimes feux, qui faisaient de la traversée nocturne de certaines localités une féerie brutale. Dix ans plus tard, quand le roman de Mathieu commence, le dernier haut-fourneau n’est plus qu’ « une jungle de rouille, un dévalement de tuyauterie (…), tout un fatras d’escaliers et de coursives, de tuyaux et d’échelles, de hangars et de cabines désertées ». Les décideurs proclament que « le temps du deuil est fini », les jeunes en ont « ras le bol de toute cette mémoire ouvrière ». Dans les cités misérables, « les petits dealers [ont] remplacé les cols bleus »…
PIERRE AHNNE PARLE DE "Fief" DE David Lopez

Note de lecture parue le 19/08/2018 sur le blog de Pierre Ahnne et reproduite ici avec l'aimable autorisation de l'auteur
"Au début, il faut l’avouer, on ne peut se défendre d’un mouvement de recul. Avoir enfin cessé de devoir, professionnellement,entendre en direct tous ces « wesh », ces « gros » et ses « sa mère la pute » pour les retrouver à haute dose dans le roman d’une rentrée enfin uniquement littéraire, c’est, songe-t-on, un comble. Puis on se dit que dans cinquante ou cent ans on saura peut-être grâce à David Lopez comment parlait dans les années 2010 toute une partie de la jeunesse de France. Et le chapitre désopilant où l’un des « zoulous » qui peuplent l’ouvrage entreprend de faire aux autres une dictée empruntée à Céline (« Vas-y c’est quoi comme gars bizarre ça encore ») achève de préciser le propos du jeune auteur : faire entrer, lui aussi, la langue orale dans le roman. Celle d’aujourd’hui, telle qu’on la parle de Créteil à Mantes-la-Jolie. Une langue qui a droit à la littérature, puisqu’elle existe. Et, en plus, il n’y a pas que ça...".
PIERRE AHNNE PARLE DE "QUI A TUÉ MON PÈRE" D'EDOUARD LOUIS

Une note de lecture parue initialement le 2 juin 2018 sur le blog de Pierre Ahnne et reproduite ici avec l'aimable autorisation de l'auteur.
"Il y a une certaine logique dans le fait qu’Édouard Louis en vienne au théâtre… J'avais lu Histoire de la violence (Seuil, 2016) avec un peu de réticence, agacé de l’insistance culpabilisatrice avec laquelle l’auteur tirait une gloire paradoxale de ses origines modestes ; mais j’avais été séduit par le subtil assemblage de discours enchâssés qui faisaient de lui, à mes yeux, un grand écrivain de la voix. Je n’ai pas été, dirai-je en toute modestie, le seul à le penser, puisque, alors qu’Ostermeyer s’apprête à monter précisément Histoire de la violence à la Schaubühne, Louis publie aujourd’hui un court texte dédié à Xavier Dolan et qui sera porté sur la scène du Théâtre de la Colline en 2019 par Stanislas Nordey, remercié en fin de volume comme étant « à l’origine » de l’entreprise.…"
PIERRE AHNNE PARLE DE "COCAÏNE" DE PITIGRILLI

Note de Pierre Ahnne, parue initialement sur son blog et reproduite avec l'aimable autorisation de l'auteur
Les éditions Séguier, qui ont leurs bureaux à Paris dans la rue du même nom, se consacrent, disent-elles, aux arts, à « tous les arts ». Et publient des essais, des entretiens, des biographies, avec une prédilection pour les figures de la vie artistique qui, quoique « réputées secondaires », ont exercé en leur temps une influence plus déterminante qu’on ne croit. Ainsi, récemment, de Christian Bérard, dessinateur de mode, et costumier de Cocteau, Jouvet ou Roland Petit.
« Chair de Négresses » et villas blanches
Séguier se veut, de plus, « éditeur de curiosités ». C’en est une, à plus d’un titre, que ce roman italien publié en 1921, puis, pour la traduction française, en 1939 (Albin Michel), et réédité aujourd’hui. Belle édition, bien corrigée, dûment annotée, comprenant une postface d’Umberto Eco soi-même, rien de moins. Qu’est-ce qui a conduit le fameux sémioticien à s’intéresser à l’œuvre d’un curieux personnage, né en 1893, ...
PIERRE AHNNE SUR LE LIVRE "PEUR" DE DIRK KURBJUWEIT

Note parue le 17/03/2018 sur le blog de Pierre Ahnne, à la page http://pierreahnne.eklablog.fr/peur-dirk-kurbjuweit-traduit-de-l-allemand-par-denis-michelis-delcourt-a139108946
Publiée avec l'aimable autorisation de l'auteur.
Delcourt, qui fut longtemps une maison consacrée à la bande dessinée, fait peau neuve et s’adjoint une collection de littérature. Il y a, semble-t-il, tout lieu de s’en réjouir, si on en juge à ce deuxième titre paru. Dans le roman de Dirk Kurbjuweit, qui est rédacteur en chef adjoint au Spiegel, toutes les conditions du thriller sont réunies. Randolph et Rebecca sont un couple berlinois aisé. Elle a cessé pour l’instant de travailler, il est architecte. Deux enfants, un agréable rez-de-jardin. Tout irait bien si Dieter Tiberius ne demeurait pas au sous-sol. Dieter Tiberius a « une grosse tête, un front haut et sa coiffure ressembl[e] un peu à celle d’Elvis Presley ». Il se sert chez « Penny » et non dans « un des supermarchés bio » du quartier. « D’un côté l’architecte aisé et bourgeois, marié avec une belle femme, deux enfants, de l’autre, un enfant de la DDASS, seul et sans-emploi, bénéficiant du Hartz-IV, le minimum social ». Lequel commence par adresser des poèmes à Rebecca, puis se met à harceler le couple en prétendant, de façon répétée, qu’il abuse de ses enfants. Plaintes. Visites de la police. Avocats. Comment tout cela va-t-il finir ? ...
PIERRE AHNNE SUR LE LIVRE "UN ARBRE EN MAI" DE JEAN-CHRISTOPHE BAILLY

Note parue le 17/02/2018 sur le blog de Pierre Ahnne, à la page http://pierreahnne.eklablog.fr/un-arbre-en-mai-jean-christophe-bailly-seuil-a137173712.
Publiée avec l'aimable autorisation de l'auteur
"Ce n’est sans doute que le début. En cette année de cinquantenaire, le déferlement d’ouvrages consacrés aux événements de mai 1968 est probable. Jean-Christophe Bailly s’en doute bien. Avec ce petit livre rédigé en 2004, revu et publié aujourd’hui, il ne fera que précéder la « fièvre de retours » qui s’annonce. Mais, dit-il, « en ayant tenté, et ce sera ma présomption — ou mon excuse — de l’avoir quand même esquivée ».
Ni remords ni regrets
Esquivée parce que précédée, bien sûr. Mais aussi parce que l’auteur évite avec aisance ce à quoi on pourrait et vraisemblablement on doit s’attendre. C’est-à-dire d’abord les pièges jumeaux de la nostalgie et de l’ironie rétrospective. L’ancien militant de la JCR (Jeunesse communiste révolutionnaire), dissoute « à peine quelques semaines » après son adhésion et appelée à renaître tout aussi vite en Ligue communiste (section française de la Quatrième internationale — trotskiste —), ne renie ni ne regrette rien..."
Mercy, Mary, Patty - de Lola Lafon
Note de lecture de Pierre Ahnne.
Note parue le 14/10/2017 sur son site à la page http://pierreahnne.eklablog.fr/mercy-mary-patty-lola-lafon-actes-sud-a132237292
Dans La Petite Communiste qui ne souriait jamais, Lola Lafon mêlait habilement quatre ingrédients : l’Histoire, surtout celle des années 1970 ; la manipulation par l’image et le contrôle des individus ; une jeune fille (la gymnaste roumaine Nadia Comaneci, saisie à l’instant de sa gloire, au Jeux olympiques de Montréal, en 1976) ; enfin, la fascination et le travail d’une enquêtrice qui se penchait après coup sur tout ce qui précède. Ce qui rendait le roman remarquable, c’était la question du langage et de son articulation avec le corps, laquelle constituait le point de confluence où venaient se croiser ces quatre motifs.
Excès de jeunes filles
On les retrouve dans Mercy, Mary, Patty, avec évidemment quelques décalages. Un coup à l’Est, un coup à l’Ouest : la jeune fille, ici, c’est Patricia Hearst, fille d’un magnat de la presse, enlevée et détenue en 1974 par l’Armée de libération symbionaise (SLA), puis convaincue par ses ravisseurs, au point de participer avec eux à des hold-up au nom de la révolution — certains se rappellent peut-être cette histoire vraie. Il y a aussi une enquêtrice, imaginaire, Gene Geneva, qui est venue enseigner dans un drôle d’établissement pour jeunes filles (décidément) dans les Landes. Lors du procès de Patricia, la défense lui demande un rapport sur l’affaire, lequel ne servira jamais mais sera intégré à un livre, ...
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Au fil des fêtes - Récits sur les fêtes juives

Note de lecture de Pierre Ahnne, sur son blog (reproduite avec l’aimable autorisation de l'auteur)
L'une chante (en yiddish) et a déjà enregistré de nombreux disques. L'autre est, sous un autre nom, l'auteure de pièces de théâtre et, tout récemment, d'un roman. Mais Astrid Ruff et Doris Engel sont toutes les deux spécialistes d'une langue qui nous vient d'un monde disparu.
Sholem Aleykhem, dont elles proposent ici la traduction de plusieurs nouvelles, appartenait à ce monde. Celui du shtetl, cette bourgade à majorité juive de l'ancien empire russe. Né en Ukraine en 1859, mort à New York en 1916, il est l'auteur d'une œuvre considérable et très partiellement traduite en français jusqu'à présent. Œuvre qui a connu en son temps un immense succès dans le monde yiddishophone d'Europe et d'Amérique, et dont émerge peut-être seul pour bien des contemporains le roman de Tévié le laitier, métamorphosé en comédie musicale dans les années 1970 sous le titre d'Un violon sur le toit.....
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titus n'aimait pas bérénice

Note de lecture de Pierre Ahnne
À l’heure où j’écrivais cet article il était encore très possible qu’elle ait le Goncourt. Pour finir, elle n’a eu que le Médicis. Un prix, quoi qu’il en soit, à la fois significatif et paradoxal. Pour une part, bien dans l’air d’un temps étrangement fasciné par les grands classiques et, à travers eux, qu’on le veuille on non, par l’institution scolaire. Représentatif, aussi, de ce souci obsédant d’inscrire sa vie dans d’autres vies, fameuses, si possible, qui s’exprime à travers tant d’œuvres dont des gens connus sont les héros. Et, en même temps, n’y a-t-il pas quelque anachronisme à couronner un livre qui, sur des pages entières, fait hésiter ses personnages quant à la traduction d’un vers latin, à l’heure où la langue de Virgile s’apprête à disparaître de l’enseignement secondaire ? Le ministère de l’Éducation nationale serait en droit de protester. Sans compter que consacrer un roman au plus notoire auteur d’alexandrins tient de la gageure à une époque où pratiquement plus personne ne sait en dire un correctement....
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après le silence

Note de lecture de Pierre Ahnne
Ce pourrait être un portrait-souvenir comme il y en a eu d'autres. Portrait d'un père et, à travers lui, d'une époque (la fin des célèbres trente glorieuses) comme d'une classe (la classe ouvrière) disparues. En tant que tel, le livre de Didier Castino serait déjà fort et émouvant, d'aller au-delà du simple témoignage pour entrer dans les sensations et les idées de son héros prolétaire sans condescendance ni démagogie. S'efforçant de saisir et de reconstituer quelque chose du rapport contradictoire au travail, entre souffrance (« L'acier chauffe sous mes coups et me brûle les mains, les flancs et les cuisses, les étincelles crépitent au visage et les masques de protection deviennent très vite des fournaises ») et fierté (« J'aime travailler à l'usine, produire. J'aime être ouvrier. Nous sommes là pour ça, on n'a pas toujours choisi, c'est sûr, mais on veut travailler, la question ne se pose pas »). Montrant, loin de tout manichéisme, la conscience de classe se lier, chez ce communiste croyant, à « l'Idée de Dieu », dont le Parti est à ses yeux « dépositaire » : « Elle est devant nous, il faut y aller, doucement s'approcher encore, mais il est des jours où on n'avance pas, des années et Elle reste devant nous à attendre…"...
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